La méditation n’est pas faite pour découvrir le point où cesse la souffrance. Bien comprise elle apprend au contraire à supporter les soucis et les peines d’une façon juste, c’est-à-dire féconde. – K.G. Dürckheim
Les origines
Méditer est un acte intimement lié au genre humain. C’est une façon d’être et de se tenir dans la vie qui remonte à l’éclosion de la conscience humaine. D’âge en âge, l’Homme médite sur sa nature véritable.
Imaginez ! Nos ancêtres, ceux qui ont connu les longues et harassantes journées à tenter de survivre dans un monde hostile, à défendre leur vie contre les éléments de la nature et leurs territoires, face à des créatures toutes plus menaçantes les unes que les autres. Imaginez ! Le soir venu, devant les flammes d’un feu, cette puissance mystérieuse qui éloigne le danger des animaux rôdeurs et en même temps réchauffe. Imaginez ! L’effroi ressenti sous le couvert des ténèbres percées par la lumière des étoiles, la lune qui apparaît et disparaît, Tant de forces mystérieuses et incontrôlables!
La lumière du jour reviendra-t-elle ? Où irai-je ? Que m’arrivera-t-il ? Quel est le sens de tout cela, de ma vie, de mon environnement ? Ces questions habitaient nos ancêtres, questions viscérales, émotionnelles, non rationnelles.
Aujourd’hui, si l’homme et la femme modernes ne s’inquiètent plus devant une lune qui change de forme ou le vent qui souffle, ils continuent à poser les mêmes questions : Quel est donc le sens de ma vie, de ma direction? Y a-t-il un après ? Si oui, lequel ?
Lorsqu’ils apprennent une nouvelle alarmante sur leur état de santé ou celle d’un proche ou qu’un événement menaçant survient et que nos contemporains quittent leurs écrans de télévision ou leurs téléphones intelligents, c’est que ces technologies modernes ne répondent pas à leurs questions. Ces mêmes questionnements qu’avaient nos ancêtres devant le feu, la nuit, refont surface, avec la même force viscérale et émotionnelle. Il existe maintenant des mots pour nommer les sentiments, pour préciser la peur et le sens du mystère, mais l’expérience demeure.
Des grottes aux monastères, à certains monuments et testaments, des traces de cette quête jalonnent l’histoire de l’humanité. Aujourd’hui encore, voués au silence et aux dimensions non matérielles de l’existence, nombre de femmes et d’hommes religieux et laïques portent ces questions. Certains sont connus; la plupart font partie de l’anonymat.
Le terme de méditation, précise Marie-Madeleine Davy,
… appartient aux diverses traditions d’Orient et d’Occident, aux écoles monastiques et profanes, à la musique et à la littérature. Pourvue d’un sens général, comportant le plus souvent la prière mentale et l’intériorisation, la méditation s’inscrit dans un ordre universel¹.
Le but
Le but de la méditation pour Karlfried Graf Dürckheim est la transparence à la transcendance immanente, c’est-à-dire la transparence à l’Être essentiel présent en nous². Et il ajoute que : « La méditation n’est pas faite pour découvrir le point où cesse la souffrance. Bien comprise elle apprend au contraire à supporter les soucis et les peines d’une façon juste, c’est-à-dire féconde. »
Laurence Freeman³ parle de la méditation comme d’un travail que nous effectuons pour accepter le don de contemplation déjà donné et présent dans le cœur. Méditation et contemplation sont des termes interchangeables. Méditer, c’est changer de direction non seulement dans sa conduite personnelle, mais dans les processus fondamentaux de la conscience.
Pour John Main, à qui l’on doit le renouveau de la méditation chrétienne, la méditation a pour but de « permettre à la présence mystérieuse et silencieuse de Dieu en nous de devenir non seulement une réalité, mais davantage la réalité, cette réalité qui donne un sens, un contenu et une raison d’être à tous nos actes, comme à tout notre être». (4)
Nous pouvons dire que la méditation est un moyen d’unifier en l’Être essentiel nos divisions primordiales. Plus ce centre se manifeste, plus il devient créateur d’harmonie relationnelle pour le méditant et la méditante.
Pratiquer la méditation, c’est emprunter une voie laïque ou religieuse de transformation en profondeur de l’être et de réalisation globale et personnelle. Vient un moment où l’attitude méditative-contemplative s’impose avec respect et silence devant le mystère de l’être humain et son existence.◊
1. Marie-Madeleine. Davy. Question de — Albin Michel, no 116, « Les chemins de la profondeur », 1999. p. 75.
2. K. G. Dürckheim. Méditer, pourquoi et comment, Le courrier du livre, 1976, p. 89 et 217.
3. Laurence. Freeman. Jésus le maître intérieur, Préface du Dalaï-Lama, Albin Michel, Spiritualités, 2002, p. 250-252.
4. John. Main, Un mot dans le silence, un mot pour méditer, Éd. Le Jour, 1995, p. 16.
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