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Le doyen – Symbolisme de l’arbre

par | Juil 20, 2019

Le doyen – Symbolisme de l’arbre

L’arbre est l’un des plus anciens symboles pour représenter l’homme.

La verticalité de son tronc avec ses branches et ses feuilles qui cherchent le ciel, ses racines ancrées dans la terre nourricière incarne au même titre que l’homme « l’être des deux mondes ». Comme nous, il est exposé à son environnement et soumis aux cycles cosmiques, c’est pourquoi nous n’avons pas tardé de reconnaître dans l’arbre une allégorie de notre situation humaine. On en fait un arbre mythique, voir même sacré et guérisseur qui procure protection et bienfaits à ceux et celles qui l’honorent ; en d’autres moments (plus rares), il devient un signe maléfique quand son allure rappelle nos tourments. Bref, l’arbre symbole de vie demeure toujours vivant dans notre imaginaire et c’est heureux.

Lors d’une retraite de Qi Gong dirigée par M. François Bibeau au Centre TARA  la semaine dernière nous avons eu l’occasion de rencontrer un vieil érable centenaire appelé Le doyen. Il règne dans la forêt à l’abri des regards, entouré d’autres arbres dans un silence enchanté. 

Cette rencontre avec Le doyen a été marquante et m’a suggéré de vous raconter cette allégorie avec notre propre histoire.

Une rencontre exceptionnelle

Le doyen est majestueux, à la fois imposant et vulnérable. D’aspect sombre, son écorce épaisse et solide à la base du tronc semble s’amincir vers le haut. Les racines s’étendent profondément dans le sol et viennent s’entremêler avec celles des arbres aux alentours.

Des cicatrices montrent le passage du temps. Au bas, c’est-à-dire dans sa jeunesse, elles sont enfouies sous l’épaisseur de son écorce, mais toujours visibles. On peut même voir un peu plus haut un court manteau d’écorce s’ajouter pour protéger une déchirure profonde.

Dans le clair-obscur se laisse voir la balafre d’une branche principale manquante. Nous y voyions encore les traces de coups et les dents de la scie qui ont entamé le corps de l’arbre voici plusieurs décennies. Le doyen porte les stigmates du passage des hommes qui ont coupé un de ses membres pour une utilité quelconque.

Le doyen avec sa branche mutilée.

Malgré cette blessure survenue dans son adolescence, il a continué à grandir, d’autres branches autour sont apparues s’élançant toujours plus haut à la recherche de la lumière. C’est dans la nature de l’arbre comme de tout vivant de grandir.

Ses branches nombreuses en portent d’autres, plus petites, qui donnent un feuillage des plus abondant.

Plus haut, une trace de foudre ; la branche foudroyée et maintenant sèche abrite quelques oiseaux. Mais toujours plus haut (il faut vraiment prendre une bonne distance pour percevoir le faîte du Doyen), le feuillage baigné par les rayons du soleil miroite dans une multitude de teintes et contraste avec l’aspect sombre de son tronc.

Les secrets du monde

Ce vieil érable dégage une présence à la fois forte et paisible. En sa présence, le visiteur est plongé dans les replis du temps où se tiennent les secrets du monde.

Le silence qui règne en ce lieu est particulier et incite à la contemplation, toute parole serait sacrilège. Dans ce silence, Le doyen nous met en relation intime avec notre nature profonde, authentique. Est-ce ce témoin, ou le silence lui-même ? Probablement, les deux font qu’emplies d’un profond respect, après une dernière salutation silencieuse nous prenons congé du vénérable. Ce lieu abrite une paix qui réconcilie et elle fait maintenant partie de chacun et chacune de nous ; nos pas portent l’empreinte de ce lieu.

Mémoire de l’Âme du monde

L’expérience de cette rencontre exceptionnelle vient appuyer le réel de la symbolique de l’arbre et scelle mon appartenance à l’Âme du monde. Se souvenir de cette relation essentielle est un pas important non seulement pour notre guérison, mais également pour celle du monde. L’âme individuelle soupire d’aise lorsqu’elle effleure l’Âme du monde. Signe de cette communion intime, naturelle, un chant s’élève en moi. 

Les fruits de notre expérience

Être en présence du Doyen nous met en relation avec notre propre histoire dont les racines s’étendent jusqu’au premier matin du monde. Comme l’arbre, nous portons les stigmates de l’existence. Une blessure ici, à tel âge a laissé ses marques ; parfois, nous avons été coupé d’une partie de nous et nous en portons encore les stigmates comme la branche sciée de cet érable. Mais pour la plupart, nous pouvons continuer notre route et grandir. Malgré les vicissitudes, nous produisons des fruits. Je dirais même que ces expériences si difficiles soient-elles, sont des bourgeons qui donnent leurs fruits pour nourrir ceux qui passent près de nous et qui nous suivent.

L’entraide et l’accueil 

L’âge adulte de l’arbre a vu la foudre s’abattre sur lui. Mais d’autres branches ont pris la relève. On voit même que la branche fragilisée et stérile en apparence est supportée par un arbre voisin. L’entraide entre les arbres permet de rester debout. Il en est de même pour nous les humains. Plutôt que renier la partie de nous ou de notre histoire qui a été foudroyée, l’accueil de l’autre et sa bienveillance nous permettent de poursuivre notre destinée. La force de la vie jaillit là où l’on s’y attend le moins, même au cœur de la stérilité, elle sait trouver d’autres chemins pour s’épanouir.

Au dernier versant se lève l’espérance

La vieillesse porte également la vie. L’arbre centenaire demeure jeune par ces nouvelles branches et ses feuilles. Le tronc et les jeunes pousses à son faîte réunissent le passé et le présent. C’est un signe d’espérance. Le jour, les feuilles qui semblent vouloir toucher le ciel communient avec les étoiles la nuit venue. Rabi Éléazar¹ disait que toutes les étoiles du firmament agissent en gardiennes du monde. Tout sur cette terre jusqu’au moindre brin d’herbe a son étoile qui veille sur lui pour l’aider à croître selon sa destinée.

L’espérance n’est jamais morte. Un geste d’ouverture et elle ressuscite en nous.
« L’espérance est fille de l’amour ; mieux, l’espérance est le visage de l’Amour. »² nous confie Jacques Flamand et dans ce sens elle est, je crois, la source du courage d’être qui nous donne la force de traverser et de vaincre l’adversité³.

Épilogue – Acte de présence

Ce  courage d’être se transforme en joie d’être lorsque dans notre pratique du Qi Gong nous nous unifions avec le ciel et la terre. Par cet acte de présence consciente nous participons alors à la danse cosmique de l’univers en mouvement.

Ces quelques réflexions issues de ma rencontre avec Le doyen vous auront peut-être donné le goût d’observer et d’écouter ce que l’arbre ou le rocher ont à vous révéler sur votre propre histoire. 

Je vous souhaite un bel été sous le signe de la rencontre.

Les références et les citations de cet article :

1. Le Zohar. Le livre des splendeurs, Paris, Éditions du Seuil, Coll., Sagesse, 2011, 152 p., p. 89-93.

2. Flamand, Jacques. La nuée du silence, Les éditions du Vermillon, Coll., Essais et recherches, n°. 20, Ottawa, 2011, édition numérique.

3. Je développe le thème de l’espérance et courage d’être dans mon prochain livre Traverser et vaincre les périodes troubles dans la vie.

Pour poursuivre cette réflexion sur la symbolique de l’arbre : Dictionnaire des symboles, Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, Paris, éditions Robert Laffont / Jupiter, Coll., Bouquins, 1982, 1230 p., p.71-78.

Et pourquoi pas cette pièce musicale ? Le canon de Pachelbel

REMERCIEMENTS

Je remercie madame Jessica Renaud, cuisinière inspirée, au Centre TARA qui nous a fait rencontrer Le doyen. Madame Renaud est l’auteure du livre de recettes Les empreintes gustatives. Recettes végétales géniales. On la retrouve à : www.jessicarenaud.com

Un merci également à madame Élaine Paradis, coordonnatrice du Centre TARA pour son accueil chaleureux et attentionné.

Je ne peux passer outre la présence de notre animateur et formateur, François Bibeau, qui à mon sens est un véritable guide dans l’art de vivre le Qi Gong. Merci François.

http://www.qigongfrancoisbibeau.com

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